mercredi 5 septembre 2012

Drifting

Cela fait plusieurs heures que nous roulons.
Je suis allongé sur la banquette arrière de la voiture. La plante posé derrière la place du mort me chatouille avec ses feuilles.
Soudain, la musique s'arrête. Dans les cinq secondes qui suivent, un cd de Jeff Buckley m'atterit sur le crâne.
"Tu pourrais faire attention, y'en a qui essaye de dormir derrière." dis-je à l'adresse de mon camarade con ducteur.
Nonalf : "J'essaye de nous maintenir en vie sur cette route de tous les dangers si tu le permets.
Moi : Commence par rouler à la vitesse maximale autorisée et tu élimineras 90% des risques.
Nonalf : Et tant que j'y suis je pourrai aussi faire tourner les essuies-glace je suppose.

Je repasse en position assise.
Je ne sais toujours pas ou on va. Mais là, tout de suite, je m'en fous.
Je regarde la plante que nous avons déterré dans les jardins de la cathédrale.
Nonalf est concentré sur la route. Avec la pluie, on distingue à peine les phares des voitures venant à contresens.
Moi : Dis...
Nonalf : ...
Moi : Tu m'écoutes ?
Nonalf : Si tu insistes.
Moi : Est ce que ça t'arrive de penser à ce que les gens ressentiront quand tu seras mort ?

Nonalf me jette un regard circonspet qui ricoche dans le rétroviseur.
Il commence : "Pour quoi faire ? Je sais déja qu'ils me haissent.
Moi : Mais quand tu seras mort, ils ressentiront quelque chose ? ils seront soulagés, content peut être.
A l'inverse ceux qui t'aiment seront tristes, et peut être inconsolable.
Nonalf : Vous devriez boire une bière mon cher Pastèque.
Moi : Je suis sérieux...
Nonalf : C'est bien ce qui me fait peur.

Moi : ça t'arrive de penser à toi comme entité ?
Nonalf : Non.
Moi : De te dire que tu es un corps qui se meut, et qu'on appelle par un nom, et qui se trimballe au milieu d'autres tas de chair.
Nonalf : Non.
Moi : De te sentir complètement extérieur à toi même. Savoir ce que tu as fais. Pas fais. Ce qu'on a dit de toi, en bien ou en mal. Te dire que finalement on parle de ton corps mais pas de ton âme.
Nonalf : Non.
Moi : J'ai fais une faute de frappe. J'ai écris "coeur" au lieu de corps.
Nonalf : Putain mais de quoi est-ce que tu parles pauvre malade ? Je retire ce que j'ai dis tout à l'air, tu es suffisamment atteint, ne bois surtout pas.
Moi : C'est ce que je viens d'écrire j'ai fais un lapsus mais pas une faute, mais en le relisant ça avait l'air d'être une faute mais maintenant que j'y repense c'est un lapsus. Je ne sais s'il est bienvenue ou malvenu...
Nonalf : Arrête tout de suite de délirer ou je te balance sur le bord de la route, tu n'écris pas. Tu es en train de me parler.
Moi : Peut être... Mais qui est ce qui te parle ? Est-ce que c'est moi ? Mon corps ? Mon coeur ? Les deux ?

Nonalf se retourne pour me dévisager.

Nonalf : Ecoute tu me fais flipper là. C'est quoi le rapport entre la mort et ton corps ?
Moi : Je vais mourir. Je le sais. Je sais pas quand, ni comment, et je ne veux pas le savoir. Mais quel impact ça va avoir dans la vie des gens qui me connaissent ? qui me suivent ? qui m'aiment ?
Nonalf : ...
Moi : Est ce que ça va tout changer ? Est ce que ça ne va rien changer ? Est ce que ça va être le big-bang à l'échelle microscopique ou rien ?
Nonalf : La seule chose que je sais c'est que lorsque tu seras mort... tu ne seras plus en mesure de savoir ce qu'on pense de toi.
Moi : Je n'aurai jamais la réponse ?
Nonalf : Non.
Moi : Je ferai mieux de boire une bière et de profiter de la balade ?
Nonalf : Oui, s'il te plait. Et tais-toi.

Je décide alors d'attraper une bière.


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